Durabilité et produits consommateurs : les tendances phares pour 2025

24 janvier 2025

Imaginez des concurrents unissant leurs forces pour créer des filières de recyclage là où elles n’existent pas, ou encore des supérettes mobiles sillonnant les zones rurales où les supermarchés se font rares. Face à un cadre réglementaire de plus en plus strict, le secteur agroalimentaire innove à grands pas vers la durabilité. Quelles sont les tendances qui marqueront 2025 et au-delà ? Ivo Bigaré, Industry Lead Food chez delaware, lève le voile.  

La durabilité, un enjeu vital 

« Les enjeux de durabilité sont cruciaux pour l’agroalimentaire », déclare avec enthousiasme Ivo Bigaré. Pourquoi ? « D’abord, parce que ce secteur de pointe puise dans des ressources limitées pour nourrir le monde. Ensuite, la question du bien-être animal est de plus en plus pressante.

L’impact potentiel sur l’environnement tout au long de la chaîne de valeur, par exemple pour le packaging ou le transport, est un autre point d’attention. Sans oublier que les acteurs de l’agroalimentaire font vivre des millions de travailleurs, nécessitant une juste rémunération et des conditions équitables. » La planète, l’humain et l’économie : ces trois piliers de la durabilité façonnent l’agenda 2025 de l’industrie agroalimentaire.  

Planète, humain, économie : ces 3 piliers guident la durabilité agroalimentaire.
Ivo Bigaré, Industry Lead Food

La lutte contre la déforestation : l’EUDR en ligne de mire 

Les législateurs n'ignorent pas ces enjeux durablesLe règlement européen contre la déforestation (EUDR)conséquence du Green Deal,vise à garantir que les produits mis sur le marché européen ne soient pas issus de la déforestation.

« Initialement prévu pour 2025, ce règlement sera appliqué dès 2026 pour permettre aux entreprises de bien se préparer. Et ça va concerner de nombreux produits : cacao, café, huile de palme, soja, viande bovine… », souligne Ivo Bigaré. « Les entreprises devront s’assurer que les marchandises importées, commercialisées ou produites respectent cette obligation. Elles devront donc collecter et enregistrer des données, mais aussi effectuer les vérifications nécessaires pour évaluer et atténuer les risques, et ce sur l’ensemble de la chaîne d’approvisionnement. »   

Il faudra dès lors gérer un grand nombre d’opérations. Et pour en atténuer la complexité, cela devra idéalement se faire via une approche automatisée intégrée dans les systèmes des entreprises. 


Transparence maximale avec la CSRD 

Avec la ‘Corporate Sustainability Reporting Directive’ (CSRD), l’Europe instaure des obligations de rapportage pour apporter plus de transparence. L'application de la directive se fait de manière progressive, en fonction du chiffre d’affaires, et a débuté en 2024 pour les plus grandes entreprises. « D’ici 2028, 60 000 entreprises devront rapporter leurs actions durables », en se basant sur des KPI pertinents selon leur contexte. Cette directive prévoit 1193 types de données susceptibles d’être analysées, illustrant l’ampleur de la tâche.   

Pour le secteur agroalimentaire, cela inclut des enjeux cruciaux comme l’emballage, avec par exemple l’obligation de communiquer sur les actions permettant de prévenir la génération de déchets, mais aussi sur le bien-être animal, l'utilisation des ressources en eau, ou encore l’impact des activités sur la biodiversité. Les rapports doivent être exhaustifs, couvrant l’ensemble de la chaîne de valeur, y compris les fournisseurs et les partenaires externes. Et si une entreprise ne dispose pas des informations requises, elle devra préciser les actions prévues pour les obtenir. »  

La transparence réglementaire pousse les entreprises  à innover durablement

Un passeport numérique bientôt sur les produits 

Le développement du passeport numérique des produits, fruit du règlement européen sur l’écoconception des produits durables, renforce aussi cette dynamique de transparence. Ce passeport permettra d’informer les consommateurs sur les performances d’un produit en termes de durabilité et de circularité, par exemple via un code QR renvoyant vers une plateforme hébergeant ces informations.   

« Il prendra en compte des critères variés : plastique utilisé, emballage, bien-être animal, impact sur les ressources, performances sociales… Il devrait dans un premier temps s’appliquer à des produits tels que les smartphones, ordinateurs ou batteries », explique Ivo Bigaré.  

Et à l'échelle locale, la législation évolue aussi. « Des mesures nationales comme les taxes sur le plastique instaurées au Royaume-Uni et en Espagne préfigurent l’émergence de projets similaires dans d'autres pays. »  


Des défis porteurs d’opportunités

Si les régulations apportent des contraintes, elles offrent aussi des opportunités pour créer de la valeur et innover. Des projets concrets voient déjà le jour. « Voyez ces centres de collecte laitiers où même les plus petits producteurs peuvent vendre leur lait, boostant ainsi l'économie locale », illustre Ivo Bigaré

« Ou encore cette superette mobile d’un grand groupe français qui dessert les zones rurales isolées, éloignées des grands supermarchés, recréant du lien social. »  

« Ou encore cette superette mobile d’un grand groupe français qui dessert les zones rurales isolées, éloignées des grands supermarchés, recréant du lien social. » 


Une révolution du recyclage en mode collaboratif 

Apolline Herbinet met en évidence la coalition d’entreprises agroalimentaires autour du recyclage et de la récolte de déchets. « Des concurrents s’unissent pour installer les filières de recyclage dont elles ont besoin pour leurs activités dans certains pays où elles n’existent pas encore. Cela réduit l'impact écologique et stimule l'innovation. Dans la même logique collaborative, des entreprises concurrentes exigent d’une seule voix que leurs fournisseurs respectent de mêmes standards environnementaux pour leurs cultures. »  

Autre tendance positive : cette entreprise installée en zone maritime d’un pays moins développé qui rémunère la collecte par la population locale de déchets plastiques, les réinjectant dans sa production, et procurant ainsi un triple bénéfice : économique, écologique et social. »  

Quand des concurrents s'unissent,  ils créent des solutions et ouvrent l'innovation.

Collecte de données : un défi crucial 

Quelle est la priorité face à ce bouillonnement de nouvelles tendances et réglementations ? « La collecte des données ! », affirme Ivo Bigaré. « Non seulement parce que les volumes sont énormes, mais aussi parce que les chaînes de valeur sont particulièrement étendues et impliquent souvent plusieurs fournisseurs. Disposer de données qualitatives, vérifiables et quantifiables est essentiel, même si c’est chronophage. »  

Cela permet de lancer des actions à forte valeur ajoutée, non seulement pour l'entreprise mais aussi pour ses collaborateurs et ses parties prenantes. « Il faut agir par conviction, pas seulement pour se distinguer des autres. Cela demande des compétences et des ressources adaptées, mais aussi de profiter des outils adéquats pour récolter, transformer et analyser les données. » 

Collecter des données qualitatives est la clé  pour transformer des défis en actions durables.

L’IA : un accélérateur 

En matière de solutions, l’intelligence artificielle s'impose comme un atout majeur. « Par exemple, chez delaware, nous utilisons un outil innovant qui détecte automatiquement les villes de départ et d’arrivée pour calculer instantanément le bilan CO2 de nos déplacements professionnels, en fournissant des données hyper granulaires et qualitatives. 

Auparavant, ces calculs manuels représentaient une immense charge de travail. C’est un vrai accélérateur, car le temps gagné nous permet de nous concentrer davantage sur la stratégie et notre plan d’actions », conclut Ivo Bigaré. 

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